De la légende à l’histoire

D’aucuns pourraient légitimement s’étonner du nom assez particulier de notre commune : Saint-Genest, passe encore ! De nombreuses communes de France ne sont-elles pas placées sous l’égide d’un saint portant le nom de Genest, Genes, Genis ou Genix… mais pourquoi Malifaux ?
Saint-Genest-Malifaux d'antan

 

Saint-Genest

village de Saint-Genest-MalifauxCertes, le patronyme de Genest semble lié au culte de Saint-Genest, « comédien pris à son jeu » (titre d’une tragédie d’Henri Ghéon) jusqu’au martyr, décapité, à la fin du IIe siècle sous l’empereur Dioclétien. Un vitrail dans le cœur de l’église datant du milieu du 19e siècle ne lui est-il pas consacré ? Cette tradition cultuelle qu’un ancien moine, abbé du palais de Clovis II, élu archevêque de Lyon en 660 et devenu saint lui-même, devait actualiser au 7e siècle, s’est perpétuée jusqu’à nos jours.

 

Malifaux

le centre-bourg lors d'une fêteMais, le terme Malifaux, accolé à ce patronyme a de quoi rendre perplexe ceux qui cherchent à en décrypter l’origine. Pendant des siècles, la toponymie – mot d’origine grecque : ou étude des noms (onoma) de lieu (topos) – est donc restée fille de l’étymologie, en cherchant à établir la vraie (étumos) signification de ces vocables. Or, cette connaissance du sens originaire, souvent incertain, est aussi tributaire des lois de la phonétique, bien connues des linguistes. La signification originaire peut s’être perdue par simple, mais complexe, assimilation phonétique. Comme elle exprime, symbolise et représente une aire géographique concrète, une représentation, une image.

compétition de jeux d'hiver et bobsleightC’est bien là, la difficulté d’interprétation d’un terme, comme plusieurs auteurs l’ont fait depuis le 19e siècle, à partir d’une étymologie latine plus ou moins fantaisiste – malis falcibus, ou malis faucibus, mauvaises gorges ou défilés, ou encore en reliant mali faux à fagus (le hêtre, le fayard) – il n’y eut qu’un pas vite franchi, en concordance avec les légendes locales ou des rapprochements géographiques ou linguistiques plus ou moins hasardeux. On se reportera ici, pour plus de précisions, aux écrits de l’abbé Boudarel « Vieux papiers, vieilles histoires » et aux excellents essais des auteurs de notre société d’histoire de Saint-Genest-Malifaux.

Ainsi, comme la plupart d’autres noms de lieu, la capacité à répondre aux mythes, légendes, au langage et à l’esprit du temps a commandé l’évolution sinueuse de ce terme curieux.

st-genest sous la neigeA l’instar des origines de certaines rivières ou fleuves, comme la Garonne ou la Loire au mont Gerbier-de-Jonc, il y a souvent plusieurs sources : la vraie, l’authentique et la véritable se disputent alors les faveurs des amateurs de pureté originelle et de pèlerinages aux sources ! La toponymie(*) comme l’onomastique revêt ici cet aspect de pèlerinage aux sources d’une micro-société dont l’histoire se perd dans les nimbes originelles de ses légendes.

En savoir plus sur « Saint-Genest à travers le siècle » – Bulletin de l’an 2000 [PDF – 11 Mo]

légende et histoire de St-Genest

(*) Cf. : Daniel Mandon : Toponymie et ethnologie régionale française,  in Le nom et la nomination (Editions Ères - 1990).